Histoire du Fort de Bouc

"Bouc" vient du Provençal signifiant "embouchure".
Le Fort de Bouc est situé plus précisément à l'embouchure du canal de Caronte  qui relie la mer Méditerranée à l'Étang de Berre. On y accède par bateau, l'accès étant réglementé. 

La traversée


Notre visite débute sur le port de l'Office de Tourisme de Martigues en compagnie de Justine, notre guide pour la journée. La traversée (6km, 30 minutes) va rapidement nous faire comprendre que Martigues est une ville posée sur l'eau, aux deux visages paradoxaux des XVIIe et XXe siècles. 

Le départ se fait en face du quartier de l'Ile, une vraie île habitée dès la préhistoire et consolidée par des pierres de La Couronne à l'antiquité par les gaulois. 

Justine nous conte l'histoire de Martigues durant la traversée
Au Moyen-âge, Martigues comprenait plusieurs sèdes - ces langues de terre parallèles dans le sens du chenal formées par des courants et aménagées par les hommes - qui servaient à installer les bourdigues, ces ingénieux systèmes de pêche conçus comme des pièges à poissons construits en claies de roseaux. 


Notre voyage nous mène par conséquent à proximité du Calen, l'un des derniers de France et toujours en activité à Martigues. Sur le même emplacement depuis un siècle, il assure la pérennité d'une de ses traditions culinaires renommées : la poutargue (œufs de muge séchés utilisés en apéritif ou en accompagnement de pâtes)

Au loin, se dessine le viaduc ferroviaire, premier signe d'une modernité du XXe siècle.
Construit en 1908, il va engager le territoire vers les projets pétroliers dès les années 20. 

Tout est surprenant dans cette partie !

Le quai long sur notre droite abrite une ancienne usine où l'on produisait huile et savon dès 1923. L'usine Verminck devient très rapidement le premier employeur de la ville avec un personnel très diversifié en termes d'origine géographique. Elle a fermé en 1985. 

Enfin, le Fort de Bouc se dresse devant nous percher sur son île (L'Ile de Bouc), rocher inattaquable, surmonté d'une tour médiévale carrée. 
  • Calen de Martigues - © Otmartigues / KarimK
  • Usine de Verminck à Martigues - © Otmartigues / KarimK
  • Pont tournant ferroviaire de Martigues - © Otmartigues / KarimK
  • Fort de Bouc Martigues - © Otmartigues / KarimK
Le fort militaire est resté près d'un demi-siècle dans son isolement, laissé à l'abandon face à la mer en attendant un sursaut de l'histoire. Ce monument encore peu connu est une des rares fortifications bastionnées du XVIIème restée pratiquement intacte jusqu'à nos jours. 
Nous mettons pied à terre. 

Une visite au fil des siècles 


On entre au Fort de Bouc par une demi-lune qui a pour but de protéger la courtine, l'élément le plus fragile du fort. 
Un fossé est taillé dans le roc qui est probablement submergé en partie lorsque la mer est haute. 
Nous suivons notre guide et nous le franchissons par un pont dormant et un pont levant. 

Au-dessus de nos têtes, un blason érodé annonce la couleur. 
Sur le pont, nous en profitons pour avoir une vision globale du fort. On y apprend qu'il appartenait aux seigneurs de Fos au XIème siècle. Il connaîtra alors plusieurs évolutions architecturales au fil des siècles. 

Nous pénétrons au sein du Fort pour se retrouver dans un passage voûté. Au-dessus de la voûte, la salle des gardes s'y trouve. On s'en servait comme assommoir (les soldats y jetaient des cailloux ou de la chaux bouillante pour se défendre). 

Justine nous apprend qu'on utilisait un système d'orgue pour sécuriser le pont-levis ; et non un système d'herses conformément aux forts traditionnels. On peut également y apercevoir des embrasures de tirs (des coins qui correspondent avec la casemate). Ce passage est le seul accès possible à la Place d'armes. 

Nous accédons à la cour centrale et nous nous retrouvons au pied de la massive tour carré que l'on aperçoit lors de notre arrivée en bateau. 

Le dépaysement est total, c'est une plongée dans l'histoire

Cette cour était laissée vide et favorisait notamment le rassemblement des troupes ; le fort accueillait 60 personnes en temps de paix (contre 150 en guerre).

La Tour de Bouc en pierre telle qu'on la voit daterait du XVème siècle. On lui reconnaît une ressemblance avec celle du Fort Saint-Jean, construite par le Roi René (1443/1447).  Presque carré (24x11x12), elle dispose d'un accès unique par une échelle jusqu'au 1er étage. 

La tour carré se trouve au centre du fort tel un donjon des châteaux du Moyen-âge.
Au XIème siècle, elle permettait de contrôler les navires pénétrant dans l'étang et éventuellement se protéger du pillage des pirates de Méditerranée. La pierre rose qui le constitue est extraite depuis l'antiquité des carrières qui bordent le littoral dans la région de Martigues, La Couronne. 

Elle a eu, par la suite, vocation à être utilisé comme un phare. Elle permettait de communiquer de proche en proche par des tours grâce à l'allumage des feux.
C'était notamment très efficace pour prévenir la population de l'arrivée d'un navire ennemi. La tour a résisté à tout durant des siècles, même aux allemands. 
  • Visite du Fort de Bouc Martigues - © Otmartigues / KarimK
  • Entrée du Fort de Bouc à Martigues - © Otmartigues / KarimK
  • Accès au Fort de Bouc à Martigues - © Otmartigues / KarimK
  • Tour du Fort de Bouc à Martigues - © Otmartigues / KarimK
Justine nous explique que le fort est passé de main en main, et a connu des aménagements au fil du temps. 

Un peu d'histoire


Alors que le fort avait été cédé aux marseillais en échange de non-attaque, ils seront chassés vers le début du XIIIème siècle.  A la mort du dernier comte de Provence en 1481 (Charles d'Anjou), le Roi de France (Louis XI) en profite pour s'octroyer les terres de Provence, parmi lesquelles le Fort de Bouc. 

Au XVIIème siècle, le fort devient une prison d'état où sont enfermés des prisonniers politiques.
Elle a accueilli Laurent de Colloris (président du parlement d'Aix), emprisonné pour s'être révolté contre Richelieu mais aussi pour avoir soutenu Gaston d'Orléans. Ce fût aussi le cas de Prince Casimir (Roi de Pologne) pour espionnage. 

Plus tard, Vauban est chargé par Louis XIV d'améliorer les défenses du Fort de Bouc en y ajoutant des remparts dont la forme permet de ne pas être surpris lors d'une attaque car il n'y a pas d'angle-mort. On doit aussi à Vauban, l'aménagement de nouveaux "conforts" : des logements pour les officiers, une chapelle et une sacristie ainsi que de la transformation d'un magasin en cantine. On lui doit aussi l'aménagement d'un casernement et de deux casemates (chambres fortifiées).

C'est justement notre prochain lieu de rendez-vous lors de la visite. 
  • La cour du Fort de Bouc - © Otmartigues / MyriamF
  • Prison du Fort de Bouc - © Otmartigues / KarimK
  • Tour carré du Fort de Bouc - © Otmartigues / KarimK
  • Intérieur du Fort de Bouc - © Otmartigues / MyriamF
Nous accédons à la première salle dans laquelle se situe une maquette historique du Fort de Bouc. 

Cette maquette représente le fort en son état au milieu du XVIIIème siècle et nous permet de prendre conscience de l'évolution architecturale et fonctionnelle du fort au fil du temps. 
  • Maquette du Fort de Bouc - © Otmartigues / MyriamF
  • Maquette du Fort de Bouc - © Otmartigues / MyriamF
En chemin, nous notons la présence de deux galeries utilisées pour le stockage au sec des affûts de canon. 
Nous accédons alors à la salle "Corps de Garde", une véritable reconstitution de la vie quotidienne.
Assommoir, orgue, lit, cheminée et nourriture ... tout y est. 
  • Salle des gardes du Fort de Bouc - © Otmartigues / MyriamF
  • Visite du Fort de Bouc - © Otmartigues / MyriamF
La partie de la visite que nous avons préféré est la promenade sur les remparts.  Appelé "Chemin de Ronde", il est accessible sur toute la longueur et permet de contempler des vestiges de toutes les époques.  Des meurtrières existent tout au long du chemin, nous sommes tentés d'y jeter un œil.

 La vue au sommet du fort est saisissante !

Nous rejoignons Justine qui nous énumère les travaux réalisés en 1935 par l'armée française et la mise en place de nouveaux postes de tir en béton.

En 1943, les troupes allemandes occupent le fort et complètent ce dispositif avec deux nouvelles batteries anti-aériennes, deux mitrailleuses Hotchkiss et des petites structures de défense rapprochée.  Au moment du débarquement, ils feront exploser les munitions entreposées dans le fort détruisant une partie du bastion Ouest. 

Nous nous retrouvons autour d'un canon de 36 livres. Ce sont des reliques du XVIIIème siècle, seuls deux sont d'origine situés sur le cavalier Sud et le bastion Ouest. 
Ce canon offert par la marine (base de Toulon) armait les plus gros vaisseaux français et les batteries côtières du XVIIe au XIXe siècles.

Ces canons perpétuent en mémoire, le projet envisagé par Napoléon 1er.
En charge des bâtiments militaires du littoral, il visite le Fort en 1973. Il rêve alors d'un projet d'envergure pour ce fort et pour Port-de-Bouc : la construction d'un grand port militaire. Finalement, il choisira La Spezia. 
 
  • Vue depuis le Fort de Bouc à Martigues - © Otmartigues / KarimK
  • Chemin de Ronde du Fort de Bouc - © Otmartigues / KarimK
  • Chemin de Ronde du Fort de Bouc - © Otmartigues / KarimK
  • Canon historique du Fort de Bouc - © Otmartigues / KarimK
​Dès le milieu du XIXème siècle, le canal maritime est creusé jusqu'à Martigues et l'Étang de Berre (avec 3 mètres de tirant d'eau porté à 6 mètres 10 ans plus tard). 

Port de Bouc est née officiellement le 2 septembre 1866 et va se développer autour des chantiers navals. La ville a pris la place des fabriques qui ont pendant près d'un siècle, occupées précisément la trame dessinée par les ingénieurs de Napoléon. 

Le Fort-de-Bouc est un mélange médiéval et moderne ce qui fait de lui, un bâtiment rare et atypique. 

Quelques chiffres :
• 1592 à 1633 : Grand travaux (dès 1601 par les ingénieurs Bonnefon et fils)
• 1640 à 1651 : Agrandissements des fortifications 
• 1686 : Visite de Vauban 
• 1690 à 1707 : Travaux de "confort" sous le règne de Louis XIV
• Avant 1743 : Construction de la chapelle 
• 1745 : Construction d'un phare au sommet de la tour
• 1856 à 1861 : Installations de nouvelles batteries de tir 
• 1880 : Le fort prend le nom de "Fort Suffren"
• 1889 : Déclassement militaire 
• 1919 : Le fort est remis à la marine
• 1930 : Inscription du site sur la liste des Monuments Historiques
• 1935 à 1943 : Travaux par l'armée française
• 1942 : Occupation par l'armée allemande

• 1993 : Rachat du Fort de Bouc par la ville de Martigues
• 1999 : Début de la restauration
• 2006 : Obtention du prix national "Les Rubans du Patrimoine"

• 2007 : Ouverture au public 
  • Visite intérieur du Fort de Bouc - © Otmartigues / MyriamF
  • Vision de Port-de-Bouc depuis le fort - © Otmartigues / MyriamF
  • Otmartigues / Faustine - © Otmartigues / Faustine
  • Vue depuis le Fort de Bouc - © Otmartigues / KarimK
  • Vue de Port-de-Bouc depuis le Fort de Bouc - © Otmartigues / Faustine
  • Vue depuis le Fort de Bouc Martigues - © Otmartigues / GXuereb
L'Office de Tourisme de Martigues propose ponctuellement des visites du Fort de Bouc. 
Nos agents d'accueil restent disponibles pour vous informer de la prochaine visite.